Note de la rédaction : dans cet article, nous parlons de femmes et d’hommes ainsi que de masturbation féminine et masculine pour faciliter la lecture. Bien entendu, la réflexion dépasse les genres et le sexe de chacune. D’autre part, la masturbation n’est pas non plus une pratique obligatoire. Il est tout aussi légitime de ne pas aimer ou vouloir la pratiquer.
À l’occasion de la fête de l’amour, Meufer a eu envie de vous parler d’amour de soi, et plus précisément des plaisirs personnels. La masturbation féminine est encore peu abordée dans notre société. Pourtant, sa pratique est recommandée pour devenir maîtresse de son plaisir.

Le sexe n’a jamais été un sujet tabou chez moi. J’en ai toujours parlé librement avec mes parents ou mes amies. De la même manière que je pouvais parler de mes livres préférés. La masturbation, par contre, n’a que rarement été abordée au cours de ces discussions. Pourtant, se masturber est extrêmement bénéfique pour sa vie sexuelle et son épanouissement personnel. Elle permet de connaître le fonctionnement de son corps et de mieux appréhender son désir. C’est prouvé : en se donnant du plaisir en solitaire, on augmente ses chances d’en éprouver lorsqu’on pratique avec d’autres personnes.
Mais si la masturbation masculine est largement présente dans notre société, celle féminine reste plus cachée. Comme si l’on ne voulait rien savoir de la manière dont les femmes peuvent prendre du plaisir. Selon Sigmund Freud, la masturbation féminine était même un signe d’une sexualité immature. Brimées par les scientifiques et les religions, les femmes n’ont ainsi découvert leur corps que très récemment. Pour preuve : le clitoris n’est correctement représenté dans les manuels scolaires que depuis 2017 !
De mon côté, même si je me targue d’être à l’aise pour parler de sexualité, j’ai aussi mis du temps avant de m’adonner à la masturbation. Comme 20% des femmes en 2019, j’ai longtemps été adepte du “dry humping”. Une technique de masturbation par le frottement. Je considérais cela un peu moins “honteux”, moins “sale” car ce n’était pas une pratique pénétrative. Pourtant, la majorité des femmes, quand elles se masturbent, ne pratiquent pas de pénétration. On comprend ici l’inadéquation entre les sexualités féminines et le modèle pénétro-centré qui prévaut dans notre société. Mais c’est un autre débat…
Les stimulateurs clitoridiens : LA révolution de la masturbation féminine
Mon intérêt pour les sex-toys est donc apparu “tardivement”. Lorsque l’on m’en parlait, j’avais tout de suite en tête le « Rabbit », ce vibromasseur rendu célèbre notamment par la série Sex & The City. Et autant dire qu’il ne m’attirait pas spécialement. Mais j’étais curieuse et déterminée à trouver LE jouet qui me correspondrait. C’est ainsi que, dans ma quête timide vers les plaisirs solitaires, j’ai découvert l’existence des stimulateurs clitoridiens.

Apparus aux alentours de 2015, “les aspirateurs à clito” sont très récents en comparaison des vibromasseurs traditionnels. En effet, le plus vieux sex-toy du monde est une pierre de forme phallique datant d’il y a au moins 28 000 ans ! Elle a été découverte dans une grotte allemande en 2005. Et même la plupart des sex-toys d’aujourd’hui ont été popularisés au moment de la révolution sexuelle des années 1960. Mais les stimulateurs clitoridiens représentent l’innovation la plus orientée vers la sexualité féminine. Car, contrairement aux vibromasseurs traditionnels, ils ne stimulent pas seulement la partie visible de l’organe du plaisir. Leurs puissantes impulsions soniques résonnent dans les 8000 terminaisons nerveuses du clitoris, permettant ainsi un orgasme intense et rapide.
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Sur le papier, ça donne plutôt envie. Mais de là à passer à la pratique, j’avais encore des doutes… Petit saut dans le temps. On est le 24 décembre 2020 et, alors que je suis à mon travail, je reçois une notification. “Vous êtes l’heureuse propriétaire du Womanizer Premium !”, m’informe un compte Instagram, créateur d’un concours auquel j’avais participé. Sans mentir, j’en ai crié de joie. À en faire sursauter mes collègues !
A la découverte de mon nouveau jouet sexuel
La raison de mon excitation : ce jouet a été reconnu comme LE stimulateur clitoridien par excellence. Moi qui voulais tester un de ces “aspi à clito” depuis un moment, c’était une aubaine ! Le soir-même, entre le gratin dauphinois et la bûche de Noël, je glisse, toute fière : “J’ai gagné un sex-toy !” Un silence suit mon annonce. Mon père et ma belle-mère me regardent, pantois. Puis, tout le monde rigole. Je vous l’ai dit, le sexe n’est pas tabou chez moi.
Et d’ailleurs, heureusement ! Car, quand le colis arrive enfin, je ne suis pas présente. C’est donc ma mère qui le réceptionne et, pensant qu’il s’agit d’un de ses colis, elle l’ouvre. Quand je rentre le soir, elle m’avoue gênée : “Euh, en fait, je suis désolée mais on a reçu un colis aujourd’hui… Je croyais que c’était pour moi… Du coup, je l’ai ouvert… Et, euh…”“Tu as reçu mon sex-toy c’est ça ?”, je lui réponds en souriant. Tête ahurie de ma mère : “Ah mais c’est ça ! Je me demandais justement ce que c’était«
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Assise à la table du salon, mon petit frère et ma petite sœur pas loin, je m’empresse de découvrir mon nouveau jouet. On est tous surpris par sa texture très douce et sa forme, une sorte de petite banane rose bonbon avec un embout. Force est de constater qu’il est très facile à prendre en main. Et puis forcément, sans lire le manuel, je l’allume. “Brrrrrrrrr…” Bon, ce n’est pas aussi discret que ce que je pensais. Au total, le Womanizer possède douze modes d’intensité, que je teste sur mon doigt. Ça chatouille un peu, mais j’ai encore du mal à me rendre compte de ce que cela pourrait donner sur un clitoris.
L’histoire d’un sex-toy au boulot
Le lendemain, je transporte mon sex-toy encore jamais utilisé dans un tote-bag, direction le boulot. “Elle est pas du tout voyante cette boite rose bonbon dis donc…”, je pense sur le chemin. Après avoir été témoins de mon excitation, mes collègues m’ont en effet demandé de leur montrer ce fameux Womanizer une fois réceptionné. Elles n’en avaient jamais entendu parler et étaient assez curieuses de savoir pourquoi j’étais si contente. L’objet passe dans toutes les mains : “Ah mais c’est ça ?”, “L’embout, il sert à quoi ?”, “C’est le clitoris qui se met là ? Mais comment on fait ?”, “C’est pas un jouet pénétrant en fait si ?”, etc.
Le sujet de la masturbation est lancé. Chacune y va de son anecdote. Mes collègues se connaissent depuis quatre ans pour la plupart. Elles ont entre 25 et 46 ans et ont vécu ensemble les rencontres, les séparations, les grossesses et les naissances. Elles le disent elles-mêmes : “On est plus copines que de simples collègues.” Alors, parler de sexualité et de masturbation, ça ne les gêne pas. Même si toutes n’ont pas la même expérience vis-à-vis des plaisirs solitaires.

Rien d’étonnant au vu des chiffres d’une récente étude Ifop de 2019. Selon cette enquête, 76% des femmes en 2019 admettent s’être déjà masturbées au cours de leur vie, contre 60% en 2006, 42% en 1992 et à peine 19% en 1970. “En l’espace de 50 ans, la proportion de femmes déclarant s’être livrées à la masturbation a donc été multipliée par quatre”, souligne l’Ifop. L’étude montre également une banalisation de l’usage des sex-toys au cours du temps. “Près d’une Française sur deux (43%) admet en 2019 avoir déjà utilisé un vibromasseur, contre un peu plus d’une sur trois en 2012 (37%) et à peine 9% il y a douze ans (2007).”
La masturbation féminine trouve donc petit à petit ses lettres de noblesse. Mais le chemin est encore long pour qu’elle soit totalement banalisée. En effet, l’étude Ifop démontre qu’une femme sur quatre déclare encore n’avoir jamais tenté l’expérience seule et une sur deux s’y adonne “assez régulièrement”. Soit trois fois moins que les hommes. Mais c’est aussi moins que les Néerlandaises ou les Espagnoles. Dans ces deux pays, elles sont respectivement 73% et 60% à se masturber de manière régulière, souligne une autre enquête Ifop de 2015.
“J’aurai dû l’utiliser plus tôt !”
J’ai moi-même pris mon temps avant de tester mon petit “aspi à clito”. J’appréhendais un peu car je n’avais encore jamais testé de sex-toy. C’est d’ailleurs l’une des rares fois dans ma vie où j’ai lu un manuel d’utilisation du début à la fin. Afin d’être sûre de le manier correctement, de ne pas l’abîmer (neuf, il coûte quand même 189€ !). Et puis, cela m’a aussi permis de l’apprivoiser.
Lorsque j’ai fini par me décider à l’essayer, j’étais un peu confuse. J’avais l’impression de faire quelque chose d’interdit. J’ai commencé avec le mode d’intensité le plus faible, histoire de voir, de découvrir. Mais j’ai vite augmenté jusqu’à trouver “mon rythme de croisière”. Au début, la sensation était un peu bizarre. Mais au bout de quelques minutes à peine, j’avais atteint l’orgasme. Ma première pensée a été : “J’aurai dû l’utiliser plus tôt !«
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Sans pour autant abandonner mes autres techniques de masturbation, mon Womanizer est devenu mon assurance pour atteindre l’orgasme rapidement. Ce petit jouet m’a permis de me réapproprier ma sexualité, mon plaisir. Je me sens décomplexée et plus à l’aise avec mon corps, avec ma vulve. Utiliser un sex-toy permet aussi de comprendre que la masturbation n’est ni sale, ni honteuse, ni perverse. Et qu’elle n’est pas non plus réservée à l’adolescence ou au célibat. En solo ou à plusieurs, avec ou sans sex-toy, la masturbation se pratique selon nos envies. N’hésitons donc plus à prendre le temps de nous faire plaisir !