Les Amazones, entre mythe et réalité

Lorsqu’on parle d’Amazones, on imagine le plus souvent des femmes puissantes, des guerrières sans peur vivant loin des hommes. Et cette vision n’est pas totalement fausse. Pour autant, l’existence de ces femmes hors du commun paraît difficile à prouver.

Amazones, illustration par Julie Brouant
Illustration par Julie Brouant

Si je vous dis « Xena la guerrière », des souvenirs remontent-ils ? Revoyez-vous cette princesse en armure luttant contre le mal ? Car Xena n’a de princesse que le titre. C’est une véritable chef de guerre capable de mettre K.O des démons, et même des dieux. Pas le genre de princesse à attendre sagement son prince charmant ! Pour celles qui n’ont pas connu cette série télévisée (que je vous invite à binge-watcher), Xena est un peu l’ancêtre de l’actuelle Wonder Woman. Une guerrière amazone indépendante, à la personnalité marquée et déterminée à défendre le bien. Tout le contraire donc du rôle traditionnel occupé par les femmes dans notre société patriarcale.

Amazone. Voilà un terme qui titille notre curiosité. Car derrière lui se cache la représentation d’une femme libre et courageuse, qui vit par et pour elle-même. Une guerrière invulnérable chevauchant fièrement sa monture, armée de sa lance ou de son arc et ses flèches. Dans l’imaginaire collectif, une Amazone est plus qu’une femme forte, c’est un modèle de puissance féminine qui a su s’affranchir des injonctions sociétales dues à son genre. Pourtant, nous connaissons finalement très peu de choses sur ce peuple. Par exemple, combien d’entre nous savent que le mot “Amazone” signifie en fait “sans sein” en ionien (dialecte ancien) ? La légende raconte en effet que les Amazones se brûlaient le mamelon du sein droit dès le plus jeune âge pour l’empêcher de se développer et leur permettre ainsi de mieux tirer à l’arc. Cette croyance populaire est restée même si personne n’a jamais pu le prouver…

De farouches guerrières à déesses de la vengeance

Mais d’ailleurs, la légende des Amazones, elle vient d’où exactement ? De la mythologie grecque, bien sûr ! Selon le mythe, ce sont les filles du dieu de la guerre, Arès, et de la nymphe, Harmonie, une divinité féminine d’un rang inférieur. La première Amazone connue, prénommée Lysippé, s’attire les foudres d’Aphrodite, déesse de l’amour et de la famille, en proclamant son amour de la guerre et son mépris du mariage. Pour la punir, la déesse oblige le fils de Lysippé à tomber amoureux de sa mère. Ce dernier se jette alors dans un fleuve pour échapper à son destin. Lysippé, accablée de chagrin, décide de quitter son pays avec ses filles et s’installe du côté sud de la Mer Noire. C’est là qu’elle édifie la grande ville de Thémiscyra où elle instaure une règle astreignant tous les hommes aux tâches domestiques pendant que les femmes combattent et gouvernent. Ainsi naît le peuple des Amazones. 

Une société matriarcale érigée dans un monde où la norme est au patriarcat depuis des années, forcément, cela laisse songeuse. Au fil des siècles, l’intérêt d’historiennes, savantes et poètes sur ces femmes guerrières s’accroît. Certaines estiment qu’elles sont de simples allégories de déesses de la vengeance, des représentations de toutes les femmes mortes sous la main d’un homme venues rendre justice elles-mêmes. Décidément, les femmes ont la rancune tenace ! Ces mêmes personnes affirment aussi que les Amazones tuent leurs propres fils. Des libres interprétations du mythe qui démontrent un problème encore très actuel : de tous temps, la société considère les femmes indépendantes comme des menaces pour les hommes. Il est donc préférable de faire des Amazones des femmes barbares et dangereuses. Toutefois, ces théories semblent plutôt tenir de la fiction que de la réalité. Des preuves tangibles paraissent en effet soutenir l’existence des Amazones. 

Des tombes de femmes enterrées avec leurs armes

D’après Hérodote, historien et géographe grec ayant vécu au 5e siècle av JC, des tribus scythes -peuples nomades vivant dans les steppes entre l’Ukraine et le Kazakhstan- ont combattu les Égyptiens vers 2000 av JC. L’historien estime probable que les femmes scythes aient pris les armes pour se défendre après la mort de nombreux guerriers de leurs tribus dans ces affrontements. Ainsi, en reprenant des charges habituellement masculines -gouverner et combattre-, elles seraient devenues les Amazones de la vraie vie (on est loin du côté vengeresses ou tueuses d’enfants pas vrai ?). Une hypothèse qui semble se confirmer en 1997.

Cette année là, l’archéologue américaine spécialiste de l’étude des genres et de la préhistoire, Jeannine Davis-Kimball, mène une série de fouilles archéologiques à la frontière entre la Russie et le Kazakhstan. Elle découvre alors des tombes de femmes guerrières enterrées avec leurs armes entre 600 et 200 av JC. Par la suite, une étude est menée sur les restes humains récupérés dans les tombes afin de connaître leur origine. Celle-ci démontre qu’il existe une relation génétique entre les squelettes et certaines familles Mongoles dont les filles naissent encore parfois blondes. Cela paraît insignifiant mais la blondeur est l’un des traits singuliers des Amazones, dans une région où les cheveux sont majoritairement de couleur foncée. Un résultat qui tend donc à prouver un mélange entre ces tribus et les descendantes de l’ethnie des Amazones. 

Le mythe se mêle donc au réel. S’il paraît vraisemblable d’affirmer que des femmes guerrières ont existé, nous manquons hélas de preuves pour confirmer l’existence des Amazones en tant que véritable peuple excluant les hommes. Néanmoins, elles sont sans conteste les premières féministes de l’histoire, que ce soit dans la mythologie ou dans la réalité. Libre à chacune ensuite d’imaginer leur destin…

Yleanna
Yleanna

Après trois années d'études de journalisme, j'ai fait un service civique en Équateur dans une association luttant contre les violences faites aux femmes.
Mon féminisme s'est construit aux côtés de ces femmes et de ma mère, présidente d'asso.

Grande gueule, j'adore les débats. Je suis aussi végétarienne, fan des gros chiens et de l'odeur des livres neufs. Et mes amies vous diraient que je suis une danseuse hors pair !

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