A l’heure actuelle, le résultat de l’élection présidentielle états-unienne est encore incertain, alors penchons-nous sur la vice-présidence ! Quels sont ses rôles et ses pouvoirs ? Que pouvons nous attendre de Kamala Harris et Mike Pence, respectivement colistiers de Joe Biden et Donald Trump ?

Pouvoir exécutif, pouvoir législatif
Aux Etats-Unis, les pouvoirs sont divisés en trois branches :
- Le pouvoir exécutif, confié au président, son vice-président et son cabinet
- Le pouvoir législatif, géré par le Congrès
- Le pouvoir judiciaire, géré par chaque juridiction fédérale
Le vice-président est le “bras législatif” de la présidence. A la tête du Congrès, il est chargé de proposer et voter les lois. Le Congrès est composé du Sénat (100 sénateurs, 2 par états) et de la Chambre des représentants (435 représentants, proportionnellement à la population de chaque état). Cette année, l’élection des représentants coïncide avec la date de l’élection présidentielle.
Au Congrès, le vice-président présente les projets de loi et suit les votes. Dans le cas d’une égalité au sein du Sénat, son vote peut-être décisif. A l’heure de la rédaction de cet article, la course des sénateurs est extrêmement serrée : 47 sièges sont républicains, 46 sont démocrates. Des possibles égalités s’annoncent donc à l’horizon de ce nouveau mandat.
Côté exécutif, le rôle du vice-président est assez limité. Il doit surtout se tenir prêt à remplacer le président, si besoin est : en cas de démission, d’impeachment, d’incapacité temporaire ou de décès.
Gérer un portefeuille politique spécifique ou simplement conseiller le président, le pouvoir de la vice-présidence reste à la discrétion du président élu qui décide des tâches et pouvoirs qu’il lui confie durant son mandat.
Pour autant la vice-présidence n’est pas un rôle purement ornemental. Pour Joel Goldstein, professeur de droit auteur de The White House Vice Presidency :
Être vice-président, c’est le meilleur tremplin pour une candidature à la présidence.
Alors, qui de Kamala Harris ou Mike Pence disposera d’une période d’essai de 4 ans pour convaincre le peuple américain et ses grands électeurs ?
Kamala Harris : une vice-présidente valorisée
Première femme racisée présentée pour la vice-présidence aux Etats-Unis, Kamala Harris est l’atout progressite de Joe Biden, un démocrate conservateur, pour cette élection.

A lire : Portrait de Kamala Harris, une politicienne engagée
Intelligente, charismatique, pragmatique… Kamala Harris fait impression au Sénat.
Son parcours de législatrice révèle la probable “grande cause” de sa vice-présidence : une justice moins discriminante envers les femmes, les immigrées et les personnes racisées. Elle a notamment présenté un projet de loi de réforme de la justice pour permettre une meilleure représentation des immigrés lors des procédures d’immigration ou encore réduire l’usage de caution en espèces, qui contribue à criminaliser la pauvreté.
Dans la même veine, elle a participé à la proposition de loi sur la réforme de la police, suite au mouvement Black Lives Matter.
Sur les autres sujets, sa prise de position s’est affirmée au fur et à mesure de la campagne présidentielle : progressiste sur l’écologie, elle s’est engagée à ne pas accepter de donations provenant de l’industrie des énergies fossile. Sur la santé, elle restera plus mesurée sur la réforme “Medicare for all”, se rangeant plutôt du côté du système d’assurance privé.
Fin législateur, Biden souhaite continuer de négocier avec les représentants du Congrès. En annonçant son choix pour la vice-présidence, Joe Biden a été clair : sa colistière sera une partenaire équitable qui aura le pouvoir de gérer une partie de l’agenda démocrate elle-même. On peut s’attendre à ce que sa relation avec Kamala Harris s’inscrive dans la même veine que celle qu’il a eu avec Obama, lorsqu’il était son vice-président. Une relation d’égal à égal où l’avis de la vice-présidente sera crucial dans les prises de décisions pour le pays.
Mike Pence : dans l’ombre de Donald Trump
Dans le très médiatisé débat vice-présidentiel, Mike Pence nous a révélé un peu plus qui il était et ce que l’on pouvait attendre de son potentiel nouveau mandat.

Plébiscité par les évangéliques, la lignée politique de Mike Pence s’inscrit dans une lignée très conservatrice du parti républicain. Ouvertement homophobe et sexiste, il se décrit lui-même comme “un chrétien, un conservateur, un républicain, dans cet ordre”.
Il est à l’origine des législations anti-IVG les plus restrictives du pays et considère l’homosexualité comme un “effondrement sociétal”.
S’il ne partage pas à 100% les positions politiques de son président, son débat avec Kamala Harris est révélateur : Mike Pence est, et continuera d’être, un porte-parole bien rodé de l’administration Trump.
Discret, loyal, Mike Pence vient de passer les quatre dernières années dans l’ombre de Donald Trump, n’en sortant que pendant la brève absence du président, contaminé par le Coronavirus. Dans l’ombre il est pourtant un négociateur terriblement efficace et a joué un rôle important dans l’adoption du “American Healthcare Act” (voué à remplacer l’Obamacare).
S’il ne brille pas par son charisme, il reste un atout redoutable pour l’adoption de lois toujours plus discriminantes pendant un potentiel second mandat de l’administration Trump.
Quel duo façonnera les Etats-Unis pour les quatre prochaines années ? Un partenariat d’égal à égal incarnée par une vice-présidente à la politique progressiste ? Un exécutant efficace dans l’adoption des lois ultra-conservatrices de son théâtral commandant ? Les prochains jours nous le diront.