Des bracelets anti-rapprochement pour les auteurs de violences conjugales

Depuis le vendredi 25 septembre, le bracelet anti-rapprochement (BAR) a été mis en place dans cinq juridictions françaises : Angoulême (Charente), Bobigny (Seine-Saint-Denis), Douai (Nord), Pontoise (Val-d’Oise) et Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône). Le principe est de géolocaliser les conjoints ou ex-conjoints déclarés comme violents et de veiller à ce qu’il ne s’approchent pas de leur victime.

Bracelet anti-rapprochement
Photo : Joël Saget – AFP

Depuis le 1er janvier 2020, le collectif Nous Toutes décompte 70 victimes de féminicide, un chiffre en constante augmentation. En 2019, 149 féminicides ont été relevés par le collectif et 146 par le ministère de l’Intérieur (contre 121 en 2018). 

Le bracelet anti-rapprochement était l’une des mesures principales annoncées lors du Grenelle contre les violences conjugales, grande concertation qui a eu lieu à l’automne 2019. Ce dispositif est réclamé depuis plusieurs années notamment par les différentes associations de lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Mis en place depuis le 25 septembre dernier dans cinq juridictions françaises (Angoulême, Bobigny, Douai, Pontoise et Aix-en-Provence), le BAR est présenté par le ministre de la Justice comme un « outil particulièrement innovant qui renforce considérablement la protection des victimes ». Mille bracelets sont pour le moment disponibles et assignés au cas par cas par les juges. La mesure sera généralisée dans tout le territoire français à partir du 31 décembre 2020. 

Comment fonctionne ce bracelet ?

Le bracelet anti-rapprochement est porté à la cheville par l’auteur des violences, et permet ainsi de le géolocaliser grâce à un système GPS. « Une communication est établie entre le système d’information et chacun des appareils déployés, via le réseau privé et sécurisé interne à la justice. Il n’y a pas d’accès à Internet », a expliqué Isabelle Rome, haute fonctionnaire à l’égalité femmes-hommes, à France Inter. La victime, quant à elle, doit porter en permanence un boîtier, afin de la localiser également et de calculer la distance entre les deux individus.

Lorsque l’individu entre dans le périmètre d’éloignement délimité par la justice, une alarme se déclenche et un signalement est émis. Le centre de contrôle prévenu se met en contact avec la victime pour la protéger et la prévient ainsi du rapprochement de son agresseur. Si l’auteur des violences reste dans le secteur qui lui est interdit, la police est alors avertie afin d’intervenir. 

Le BAR est équipé d’une batterie ayant une autonomie de 48 heures. Son propriétaire est ainsi tenu de  la recharger, sous peine d’être en infraction. 

À qui est destiné ce bracelet anti-rapprochement ? 

La mise en place du BAR est décidée par les juges. Il faut donc que l’auteur des violences soit jugé pour que celui-ci soit délivré. Il s’agit d’une condamnation, qui ne peut être cumulée avec une peine de prison, l’éloignement étant déjà radical dans ce cas. En effet, les juges décident de cette mesure dans le cas où une ordonnance de protection et le « téléphone grand danger » (dispositif de téléprotection permettant d’alerter les forces de l’ordre en cas de danger) ne seraient pas suffisants. 

Il est également possible de mettre en place ce dispositif dans le cadre d’une procédure pénale et d’un contrôle judiciaire (c’est-à-dire avant le jugement) dans le but d’appuyer une demande d’éloignement, notamment si le mis en cause est considéré comme très violent et qu’il y a des risques de récidives. 

De plus, et c’est là la grande nouveauté, ce dispositif peut être mis en place dans le cadre d’une procédure civile, c’est-à-dire par les juges aux affaires familiales, accompagnant ainsi une ordonnance de protection d’une personne dénonçant des violences. Dans ce cas, l’individu à l’origine des violences doit donner son accord. Face à un refus, les juges peuvent alors saisir le parquet dans le but d’ouvrir une procédure pénale. 

Un dispositif testé et approuvé en Espagne

Ce bracelet anti-rapprochement fait ses preuves en Espagne depuis 2009. Depuis cette date, 6 678 bracelets ont été imposés à des personnes reconnues violentes avec leur partenaire. A la suite de la mise en place de ce dispositif, aucun féminicide n’a été commis par un auteur de violences qui en était équipé. En 2019, 55 femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint en Espagne, selon les chiffres officiels, et 35 depuis le 1er janvier 2020, des nombres bien plus bas que les décomptes français.

Néanmoins, en Espagne, cet équipement ne représente qu’une des mesures prises par le gouvernement socialiste de José Luis Zapatero, en 2004. C’est à cette date qu’a été adoptée la loi visant à la  protection des victimes contre les violences conjugales, appelée « loi de protection intégrale contre les violences de genre ». À cette occasion, des unités dédiées ont été créées afin de protéger les victimes, ainsi qu’une spécialisation des tribunaux. 

Ainsi, si le bracelet anti-rapprochement fait ses preuves, il reste cependant essentiel de l’accompagner d’autres mesures visant à mieux lutter contre les violences conjugales. Sa mise en application en France représente une avancée importante mais ne doit pas être considérée comme la seule réponse à « la grande cause du quinquennat ».

Perrine Bontemps
Perrine Bontemps

Actuellement étudiante en journalisme, j’ai commencé par une licence de sociologie avant d’arrêter mes études pendant trois ans. J’ai expérimenté, découvert, appris, au travers d’un service civique, de voyages et de rencontres inattendues.

Aujourd’hui, je pense avoir trouvé ce que je veux vraiment : déconstruire la société pour mieux la réinventer et faire toujours plus de projets pour y parvenir.

Sinon je suis aussi végétarienne, toulousaine et en amour pour la musique et les chats.

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