Présomption n.f. emprunté (v.1170) au latin praesumptio : « prise anticipée ». En grec, prolêpsis désigne une idée antérieure à toute expérience. En droit le mot présomption s’entend rapidement comme « l’induction par laquelle on remonte d’un fait connu à un fait contesté ». (1283).

La présomption d’innocence : un droit fondamental
De nos jours la présomption est – et heureusement – un droit fondamental. Mais qu’est-ce qu’un droit fondamental ? Il s’agit de droits essentiels sur lesquels le droit se construit, ses fondations. Sans présomption d’innocence pas de justice en somme.
En droit français, la présomption d’innocence est donc un principe fondamental à la procédure pénale.
Le droit pénal est le droit le plus médiatisé, sans doute par son sensationnalisme et parce qu’il regroupe des enjeux de société majeurs. La procédure pénale quant à elle doit surfer entre condamner les coupables et assurer la liberté des innocents. Autant dire, un sacré jeu d’équilibriste. Et comme la procédure pénale est assurée par des êtres qui ne sont qu’humains, des fois, ça se casse la gueule.
Une mécanique de preuve
La présomption d’innocence dans la procédure pénale, pour entrer un peu dans la technique, est un mode de preuve. C’est-à-dire, qu’il appartient à la partie poursuivante de prouver ce qu’elle avance. En gros, c’est à l’État que revient la charge de la preuve et ce via les moyens d’enquêtes qui appartiennent à la police, sous le contrôle des magistrats du parquet (le procureur de la République) et parfois du siège (le juge de la liberté et des peines ou encore le juge d’instruction).
Pour autant qu’il s’agisse de l’enquête ou de l’instruction, celles-ci, pour respecter la présomption d’innocence, doivent se faire à charge et à décharge. Le magistrat chargé de l’enquête ou de l’instruction doit chercher les preuves autant de la culpabilité de la personne mise en cause que des preuves de l’innocence de cette dernière.
Rappelons alors les textes. La présomption d’innocence figure avant tout dans l’article préliminaire du code de procédure pénal : « toute personne suspectée ou poursuivie est présumée innocente tant que sa culpabilité n’a pas été établie ». Le texte ajoute que les atteintes à la présomption d’innocence sont réprimées par la loi. Le législateur a donc prévu des lois permettant à la personne mise en cause d’être considéré comme innocente tant que non-jugée coupable. Ainsi la presse ne peut présenter une personne mise en cause comme coupable, le port des menottes est réglementée, la détention provisoire est strictement encadrée, l’instruction est secrète, le doute doit bien évidemment profiter à l’accusé, etc.
Un droit absolu ?
L’article 9-1 du code civil lui dispose que « Chacun a droit au respect de la présomption d’innocence. Lorsqu’une personne est, avant toute condamnation, présentée publiquement comme étant coupable de faits faisant l’objet d’une enquête ou d’une instruction judiciaire, le juge peut, même en référé, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que l’insertion d’une rectification ou la diffusion d’un communiqué, aux fins de faire cesser l’atteinte à la présomption d’innocence, et ce aux frais de la personne, physique ou morale, responsable de cette atteinte ».
Maître Henri Leclerc écrit pourtant que « l’accusé est bien un présumé coupable. Les indices graves et concordants de culpabilité, puis les charges, sont de véritables présomptions de culpabilité, et celui qui est confronté à la justice, […] mis en examen, prévenu ou accusé, est un innocent de principe contre lequel pèsent de telles présomptions de culpabilité qu’il est déjà un semi-coupable qui devra, s’il veut échapper à la condamnation, détruire les indices accumulés contre lui. L’avocat le sait bien, qui doit s’acharner à expliquer devant le juge correctionnel ou les jurys d’assises pourquoi jusque-là tout le monde s’est trompé ».
Ce qui signifie en quelques mots que la présomption d’innocence, n’est et ne peut par essence être totalement effective.
Une instrumentalisation sexiste
D’ailleurs même le législateur admet que la présomption d’innocence n’est pas absolue. La détention provisoire en est le parfait exemple. Pourquoi enfermer quelqu’un avant jugement qui serait présumé innocent et à qui le doute devrait profiter ? L’enquête dite de flagrance qui permet des atteintes à la liberté de chacun très invasives, n’est-ce pas une atteinte à la présomption d’innocence ? Un salarié accusé de harcèlement envers des collègues mis à pied à titre conservatoire, n’est-ce pas une atteinte à la présomption d’innocence ?

Mais dans ces cas là, dans le cas d’un meurtre, d’un rapt d’enfant, du vol à main armé, d’un trafic de drogue même, personne ne s’élève pour défendre la présomption d’innocence. Au contraire, les chiffres de la détention provisoire se cessent d’augmenter.
En revanche, quand il s’agit l’auteur d’un viol présumé, appartenant à une certaine classe sociale et blanc de surcroît, il faudrait protéger coute que coute la présomption d’innocence ? Et lui permettre d’accéder aux plus hautes fonctions de l’Etat ? Un Etat en proie à une crise démocratique telle que la démocratie elle-même s’en trouve menacée ?
La présomption d’innocence serait-elle importante que quand il s’agirait de museler les victimes de viols ?
Sources :
Dictionnaire historique de la langue française sous la direction d’Alain Rey, Le Robert
Patrick Maistre du Chambon, Procédure pénale dans Dictionnaire de la culture juridique, Editions PUF