Mon cerveau et moi, à la conquête de la « mental-positivity »

J’ai l’impression que notre époque est celle, plus que jamais, du « body-positivisme ». Et c’est très cool. Les injonctions à entrer dans tel ou tel moule s’effacent petit à petit pour laisser place à l’amour. Le « self love » envahit les réseaux (à l’image du compte instagram @maryscupofteaa ou encore @selfloveclubblog). Les invitations à s’aimer surgissent de partout, m’incite même à me le tatouer sur mon avant bras ce fameux « self love », ce Saint-Graal qui semble être la clé de tous les bonheurs.   

Ça me comble de joie qu’on fasse enfin preuve d’un peu de tendresse envers nos corps. Qu’on leur susurre des mots doux pour apaiser la peine causée par des années de jugement (et je ne parle pas de ceux d’autrui). J’ai les poils qui se hérissent chaque fois que j’entends quelqu’un parler avec bienveillance de son corps. Chaque « je t’aime » à vos courbes est une belle victoire pour notre époque. 

Mais nos cerveaux, dans tout ça ? Notre santé mentale ? On en parle seulement à mi-voix. On chuchote des « ça va aller », « tu devrais te reposer », « c’est juste dans ta tête » en espérant bien faire. L’intention est louable… Mais ça ne va pas. Il ne suffit pas d’une sieste. Et c’est peut-être juste dans ma tête, mais la douleur irradie dans chaque recoin de ma vie. 

Aujourd’hui, à 27 ans, j’accepte mon corps avec toutes ses fluctuations. Je lui pardonne même ses crampes menstruelles et ses cuisses un peu trop flasques. Je le comprends, je le pardonne et je l’aime. Mais si mon corps est un « je t’aime », mon cerveau est une claque, un raz-de-marée, un ouragan… Aujourd’hui, je m’adresse à lui dans l’espoir d’apaiser nos conflits. 

Illustration cerveau, Canva

Cher petit cerveau, 

T’es un peu essoufflé, pas vrai ? T’as une sacrée énergie faut dire ! Allez viens, assied-toi, je crois qu’il faut qu’on se parle. Je ne sais pas si tu sais, mais tu me fous les jetons. J’ai peur de ta puissance, j’ai peur de ton élan, j’ai peur de ce capharnaüm sans formes ni limites. J’ai peur de ce que les autres pourraient penser de toi. C’est par ta faute que je suis « trop » et je ne sais pas comment gérer ça.

Tu ne sais pas t’arrêter, n’est ce pas ? Mon cher petit cerveau… je ne te déteste pas vraiment, mais dieu que tu me fatigues ! T’es cette grosse turbine qui ne cesse de fabriquer des pensées, des pensées qui sont dans ma tête comme des sardines dans une boîte. Elles étouffent et parfois, j’ai le sentiment d’étouffer avec elle. Pourquoi t’as ce besoin permanent de tout analyser ? Pourquoi tu ne laisses pas simplement l’existence être, sans te demander : « et si je prends cette décision aujourd’hui, j’en penserai quoi dans 10 ans ? » « et si je mourrai demain ? » « et si personne ne m’aimait vraiment ? » « Et si je n’étais qu’un mirage ? » « Et finalement, qui est arrivé le premier, l’oeuf ou la poule ? » Et pourquoi avec toi, faut toujours tout ressentir avec une telle énergie ? T’es trop rapide, t’es trop sensible. Ça me rend forte, et puis ça me rend fragile.

Tu sais, toi qui galopes, il ne m’en faut pas plus pour avoir la sensation d’être en train de me noyer. Pourtant, j’essaye vraiment très fort de t’aimer.

Alors viens, on se prend un mojito et on se pose, tranquilles, sur la plage de nos idées ; sans se bousculer. Viens, on fait le tri dans toutes ces informations. Viens, on essaye de se faire du bien en s’allégeant un peu. En n’attendant pas que ce soit les autres qui nous disent « ça va aller ». Viens, tu deviens ce genre de turbine qui crée de la lumière, plutôt que de l’obscurité.

Mon petit cerveau… Et si toi et moi, on respirait un grand coup ? Si on arrêtait de se remettre en question à chaque seconde ? Si on essayait d’avancer main dans la main, d’aller au bout de ce que l’on projette, de jeter ce qui prend de la place pour rien ? Si on embrassait cette puissance sans se laisser dévorer par elle ? Si l’on s’apprivoisait ? 

Et dis, tu veux pas qu’on lance le mouvement « mental-positivity » (*positivité mentale), pour se sentir moins seul.e.s et plus écouté.e.s ? Parce que je sais bien que t’es pas le seul petit cerveau un peu trop sauvage, libre et inconstant. Je sais bien que y’a plein de gens comme moi qui courent après eux-mêmes jusqu’à ne plus sentir leurs poumons. L’esprit trop dense, les nuits trop amères… A toi qui luttes contre l’immensité complexe de ton mental, hyper-sensible, précoce, angoissé, qu’importe le nom qu’on a posé sur ton cerveau… Permets moi de te dire, d’un esprit tout feu tout flamme à un autre : ça n’est pas toi qui es trop, ce sont les autres qui ne sont pas assez. 

A toi, mon petit cerveau jamais tranquille, toujours en fusion, trop attentif au monde : je t’aime pour cela, je te déteste pour cela aussi. Mais j’ai envie d’apprendre à parler ton langage. J’ai envie que toi et moi, on se tire vers le haut. J’ai envie d’être la voix capable de t’apaiser et que tu sois celle capable de m’entraîner, mais toujours avec douceur, vers les plus hauts sommets. C’est pas gagné, mais j’ai envie qu’on s’aime, tout simplement. Parce que toi, notre corps, moi, ça devrait être une union sacrée… 

Certes, pour l’instant tu vas trop vite pour nous mais tiens-toi prêt : je ferai tout pour te rattraper, te serrer dans nos bras, te susurrer que t’es beau, que t’es puissant et que je n’ai plus peur de toi.

Clotilde Boudet
Clotilde Boudet

Tu vois la meuf qui parle de cul hyper fort en terrasse en mettant parfois ses voisins méga mal à l'aise ? C'est moi. Je m'appelle Clotilde, j'ai 27 ans, je suis parisienne et journaliste spécialisée dans le lifestyle (le style de la life quoi).

A 17 ans je pensais être une rebelle et finalement, je suis devenue un vrai cliché : j'aime plus Paris, je jardine, cuisine, médite, voyage. J'aime mon chat (sauf à 5h du mat, les proprio de félins savent...). Mais SURTOUT, j'aime écrire et débattre et croire qu'avec pas grand chose, chacun à son échelle, on peut changer le monde.

Les derniers articles

Inscris-toi à la newsletter !

Sur le même sujet...